Le milieu communautaire inquiet.


La société québécoise est préoccupée par un discours dominant qui, avouons-le, est inquiétant; l’austérité est un mal nécessaire pour favoriser le développement du Québec. Les politiciens ne cessent de nous souligner que la dette du Québec est si importante qu’elle paralyse les choix gouvernementaux, il faut dégager de la marge de manœuvre pour créer de la richesse. Les médias nous rappellent à quel point les travailleurs sont étouffés par l’impôt et les taxes, nous ne pouvons plus supporter un appareil gouvernemental aussi coûteux.

Pourtant, qui peut m’expliquer de quoi est constituée la dette du Québec? Qui peut m’expliquer la stratégie du gouvernement? Pourquoi un petit groupe de personnes, bien que ce soit des élus, peut-il procéder à des changements aussi importants que ceux qui s’opèrent présentement, sans s’associer avec les personnes qui sont sur le terrain, autant au niveau de la santé, de l’éducation, du développement économique que de l’action communautaire? Alors que tout projet de développement exige l’acceptation sociale, comment un gouvernement peut-il négliger cet aspect?

Le 23 octobre dernier, plus de 160 personnes provenant des groupes communautaires estriens ont pris une journée de leur temps pour tenter de mieux comprendre la situation. Pourquoi ce discours d’austérité est devenu le symbole des gouvernements? Quel est le choix du gouvernement et comment il s’explique? Est-ce qu’il y a d’autres solutions? Voilà autant de questions auxquelles les conférenciers ont tenté de répondre. 

Cela a permis de mieux comprendre le contexte actuel et a aussi permis, aux différentes personnes présentes, de réfléchir ensemble. Vous ne serez pas surpris si je vous dis que pour la grande majorité des personnes présentes, la situation actuelle est très difficile. Œuvrant auprès des plus démunies, les travailleurs (euses) du communautaire constatent déjà les effets des différentes mesures d’austérité. Pour rencontrer leurs obligations, les dirigeants des différentes organisations touchées par les décisions récentes, regardent vers le bas de la pyramide qu’ils dirigent. Il est plutôt rare d’entendre qu’un dirigeant accepte une baisse de salaire, qu’il suggère un partage des responsabilités parmi le personnel cadre! Les grands perdants, ce sont les plus jeunes, les contractuelles, les plus fragiles.

La crainte des groupes dépassent largement les intérêts corporatifs. Il suffit d’être près des personnes œuvrant au sein de ces organisations pour comprendre à quel point la charge de travail est importante. Les personnes vivant des situations précaires sont de plus en plus nombreux et leurs situations de plus en plus compliquées. Plus que jamais, il est nécessaire de mieux soutenir l’action des groupes, de s’assurer que les interventions soient complémentaires, de favoriser un climat propice au développement des personnes que nous côtoyons. Comment accepter des rumeurs voulant que le financement des groupes soit remis en question, alors que l’impact des mesures d’austérité augmentera la détresse sociale des personnes supportées par le milieu communautaire? 

par Alain Roy