Déception

Le premier budget Leitao se préparait depuis déjà quelques semaines. Nous savions qu’il fallait économiser, que la dette du Québec était maintenant trop importante, que tout le monde devrait faire un effort. Nous étions prêts pour de mauvaises nouvelles. Nous avions compris qu’il fallait favoriser la création de la richesse, que des investissements ciblés pour favoriser la création d’emploi étaient à prévoir que le gouvernement favoriserait la relance du plan Nord. Aucune surprise.

Pourtant, le budget présenté par le gouvernement Couillard déçoit plus qu’il réjouit. Mais… le gouvernement devait faire des choix difficiles et nous étions prêts à nous serrer la ceinture. Toutefois, les réactions face à ce budget ne démontrent pas une grande solidarité. Tout le monde est prêt pour le combat de la prochaine année. Déjà, la promesse de mesures encore plus austères lors du prochain budget est lancée. Nous entendrons que le pire est à venir, qu’un gouvernement majoritaire « doit » agir rapidement, qu’il faut des mesures structurelles et non cosmétiques. Tous les lobbys se préparent, les arguments seront tellement nombreux que nous aurons de la difficulté à départager l’effort du droit acquis. Nous pourrons tous expliquer que notre mandat est le plus important, que nous ne pouvons pas voir un recul de nos moyens d’agir, qu’il faut maintenir notre expertise, qu’il n’y a vraiment plus de place pour couper sans affecter les services à la population et bien d’autres encore.

Mais, collectivement, aurons-nous réellement le courage de ce choix qui ne semble pas vraiment en être un? Est-ce que le gouvernement osera appliquer les mesures d’austérité à ceux qui ont les moyens de les absorber? Est-ce que les choix s’attaqueront à nos pratiques, nos habitudes, notre confort organisationnel? Saurons-nous, comme société, appuyer le support aux plus démunies avec la même vigueur que le maintien des acquis des mieux nantis? Serons-nous vraiment courageux?

Pour le milieu communautaire, la pilule est difficile à avaler. Pourtant, nous avions compris le message, il faut faire notre part. Mais justement, nous avons l’impression que notre part est plus importante. Les organismes communautaires sont déjà sous-financés, les personnes que nous supportons nous parlent rarement de leur incapacité à atteindre leur maximum de contribution à un REER.

Consciencieux, les travailleurs du communautaire, une grande majorité de femmes, suggéreront à leur C.A. des gels de salaires, des diminutions d’heures de travail pour tenter de maintenir la qualité des services offerts. Ce ne sera peut-être pas suffisant. Que pourrons-nous répondre à ceux qui ont confiance en nous, ceux qui n’ont souvent pas d’autres options? Attendez deux ou trois ans?

Nous ne sommes pas déçus de participer à l’effort collectif pour retrouver l’équilibre budgétaire si cher à notre société de consommation. Nous sommes déçus que les choix courageux ne ciblent pas ceux qui ont les moyens de les assumer.

Par Alain Roy